Livres des « docteurs »
image_pdfimage_print

image_pdfimage_print

Les docteurs, auxquels est consacrée la deuxième grande partie du Catalogue, sont les auteurs de référence pour la spiritualité et pour la doctrine chrétienne.

Les docteurs sont recensés par ordre chronologique, en commençant par les Pères de l’Eglise.

Sont ensuite cités des auteurs de la période carolingienne, puis saint Bernard et ses contemporains, et enfin des auteurs plus récents, cisterciens ou se rattachant par leurs écrits à la tradition cistercienne. Le catalogue de 1472 abonde en renvois aux commentaires de la Bible par ces mêmes auteurs, recensés dans la partie précédente.

La collection des Pères de l’Eglise, presque entièrement constituée au XIIe siècle, est d’une richesse remarquable. Elle s’ouvre sur vingt et un volumes des Pères grecs, Origène mais aussi saint Basile, saint Jean Chrysostome et un auteur mystique désigné de nos jours comme le Pseudo-Denys. Clairvaux ne conserve que des traductions latines de leurs œuvres.

Les Pères latins représentent quant à eux une centaine de volumes : commentaires bibliques, sermons, ouvrages doctrinaux et textes polémiques écrits contre diverses hérésies.

Le monument le plus remarquable de cet ensemble est la collection complète des Opuscules de saint Augustin, en sept volumes de très grande taille, copiés dans les années 1140. Cette collection rassemble même des œuvres rares, comme l’Opus imperfectum, ouvrage de saint Augustin qu’il écrivait au moment de sa mort et resté inachevé. On sait à présent que cette collection ne fut pas compilée à Clairvaux ; mais un travail critique original y fut mené, Nicolas de Clairvaux ayant fait noter justement dans le texte de l’Opus imperfectum des variantes d’un manuscrit de Cluny de la même œuvre.

À la charnière de l’Antiquité et du Moyen-Âge, Boèce (v. 470-524) est l’auteur d’une Consolation de la philosophie qui concilie la quête chrétienne de l’amour de Dieu et l’étude de la philosophie par le biais des disciplines issues de l’Antiquité. Cet ouvrage, un des plus lus au Moyen Âge, a eu une influence déterminante sur l’enseignement médiéval. Les auteurs postérieurs ne se limitent pas à des sujets religieux. Ils s’illustrent également dans les genres didactique, poétique, historique, encyclopédique et même métaphysique.  

Je me mis à chercher à part moi s’il n’était pas possible de découvrir un argument unique qui, pour être probant, n’eût besoin d’autre que lui, et qui, à lui tout seul, suffit à garantir que Dieu est vraiment, qu’il est le souverain bien qui ne manque d’aucun autre bien et dont tous ont besoin pour être et être bien, ainsi que tout ce que nous croyons de la substance divine. Saint Anselme de Canterbury, Proslogion, trad. Bernard Pautrat, Flammarion 1993

Saint Bernard tient naturellement la première place parmi les auteurs du XIIe siècle. Il composa une nombreuse correspondance, des sermons et plusieurs traités. Dans ces derniers, il s’exprime en matière de spiritualité, mais aussi de philosophie, de doctrine et d’organisation de l’Église. Ses deux œuvres majeures sont le Traité de la considération, composé à l’intention du pape, et les Sermons sur le Cantique des Cantiques. Il développe une spiritualité de l’action dans le premier ouvrage, de la contemplation dans le second, qui restent des références pour les chrétiens.

Le Catalogue recense vingt-neuf volumes de saint Bernard, dont un tiers de florilèges. Les Sermons sur le Cantique des Cantiques tiennent la première place dans cet ensemble. Si la bibliothèque de Clairvaux possède l’ensemble des œuvres de son premier abbé, elle n’en conserve pas les manuscrits les plus anciens. La plus ancienne collection conservée à Clairvaux est un manuscrit prototype, copié vers 1160 et destiné à servir de modèle pour la diffusion des œuvres de saint Bernard. Les copistes de ce manuscrit ont introduit des erreurs et des modifications importantes dans le texte original.

Après saint Bernard sont cités : Richard de Saint-Victor et Hugues de Saint-Victor, deux maîtres parisiens contemporains de saint Bernard et proches de lui par leur enseignement ; Eudes de Morimond 1 et Alain de Lille, deux auteurs cisterciens de la fin du XIIe siècle ; enfin, Pierre de Ceffons, un moine de Clairvaux qui tint une chaire de théologie à Paris au milieu du XIVe siècle. Les travaux de ce dernier n’ont rien de commun avec ceux des auteurs précédents, ils relèvent de la théologie scolastique qui trouve normalement place dans une autre partie du catalogue ; son rattachement aux « docteurs » est une marque d’honneur envers un moine de Clairvaux.   

Une place à part est faite aux « Epîtres des docteurs ». Le genre épistolaire est particulièrement goûté au Moyen-Âge. Cette partie du catalogue comporte surtout des renvois. Y sont recensées les œuvres d’auteurs s’étant illustrés plus particulièrement dans ce genre : Sidoine Apollinaire, Yves de Chartres et surtout Pierre de Blois, dont la correspondance constitue un modèle de style avant l’humanisme. Car c’est bien de style qu’il est question, autant sinon plus que de pureté dogmatique. À preuve, cette sous-partie commence par un renvoi aux épîtres de Cicéron 1 et s’achève par un autre renvoi à celles de Nicolas de Clamanges, un des précurseurs de l’humanisme en France. Cette partie consacrée à la correspondance rassemble manifestement des ouvrages qui n’ont pas trouvé place ailleurs.

Références

  1. 1.  La mention d’Eudes de Morimond parmi les docteurs est surprenante, sa notoriété n’étant nullement comparable à celle des autres auteurs du XIIe siècle cités ici.
  2. 2.  Parmi les additions faites peu après la rédaction initiale du catalogue figurent les épîtres de Sénèque.